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 | Sujet: Investiture à la Proclamation de l'ombre  Ven 27 Avr - 18:56 | |
| Passation de pouvoir
*** Dorian marchait dans la passerelle qui menait à la salle de la convention. Cette pièce, ou plutôt cet amphithéâtre était le coeur de la Proclamation de l'ombre. C'est là que se déroulaient les conseils, les jugements, que l'on votait les textes de loi, que l'on délibérait, bref, que se passait les choses importantes. Les étrangers n'étaient pas admis dans cette arène où se jouait parfois des scènes qui pouvaient changer l'univers tout entier. Récemment, la Convention (c'était le nom que l'on donnait aux magistrats qui travaillaient ici) avait subit de grands changements politiques. L'Architecte précédente, Aloïs Undar, avait dût présenter sa démission à la suite de l'affaire des planètes volées.
Ça avait été l'un des pires scandales de l'histoire de la Convention, elle avait été impuissante alors que plusieurs planètes se volatilisaient aux quatre coins de l'univers et du temps, que les daleks prévoyaient de détruire la réalité. Si le Docteur n'était pas intervenu à temps, l'univers aurais cessé d'exister, aussi simplement que ça. C'était inacceptable de se reposer sur un individu aussi instable et imprévisible que le Docteur pour sauver l'univers. N'était-il pas responsable de la disparition des seigneurs du temps ? C'est affaire n'était toujours pas élucidée. Des rapports confirmaient que le Docteur était impliqué dans cette sombre affaire. Mais Il avait été le seul à éviter une catastrophe universelle. Quelle frustration ! Faire respecter les traités par un tel individu ! La Proclamation de l'ombre avait été crée pour remplir cette fonction mais se révélait incapable de faire appliquer les lois qu'elle votait. Ça devait changer. Suite à cette sombre affaire, d'autre événements importants s'étaient produits, comme l'effondrement temporel causé par l'assassinat du Docteur par le professeur River Song au lac Silencio en Utah. Encore lui. L'Architecte par intérim, un petit bureaucrate sans envergure, avait quitté ses fonctions à cause de ça. Et aujourd'hui, c'était le jour de l'investiture de Dorian au poste d'Architecte des ombres. Il attendait ce moment depuis des années. Depuis bien longtemps déjà, il tirait des ficelles, manipulait, travaillait comme un forcené, tout ça pour gravir peu à peu les échelons de cette organisation jusqu'au stade suprême. Tous ces efforts étaient enfin reconnus et récompensés à leur juste valeur. C'était un jour historique pour lui, non pas seulement, pour l'univers tout entier.
Dorian avait de grands projets pour la convention et il avait de l'ambition. Il voulait réformer cette institution poussiéreuse pour lui donner de vrais moyens pour faire appliquer l'ordre universel. On n'avait pas besoin du Docteur pour ça, c'était les prérogatives de la Proclamation de l'ombre. Encore fallait-il un appareil exécutif en état de marche. Les judoons ne suffisaient pas. Ils appliquaient bêtement des procédures standards, sans aucun plan à long terme. Ils créaient parfois plus de problèmes qu'ils n'en résolvaient. Tsss, stupides créatures, Dorian ne pouvait pas les voir en peinture... Ensuite il y avait le T-selecta, construit par des humains et qui n'en faisait qu'à sa tête en exécutant les criminels sans procès. Il fallait que ça cesse. Tant de problèmes et si peu de temps pour les résoudre...
- La réunion des sages à été avancée, Monsieur...
Dorian eu un geste d'humeur et écarta l'androïde qui venait de lui parler. Saloperie de machine. Et bande de grabataires. Ils n'avaient que ça à faire, des réunions ? L'heure n'était plus aux réunions, l'heure était à l'action. Dorian allait faire sauter la baraque, et tant pis si ça défrisait tous ces vieux croulants de la convention. Il poussa les hautes battants de la salle de réunion avec humeur. La porte claqua avec fracas, le bruit se répercutant dans la vaste salle. Cette salle faisait toujours de l'effet sur Dorian qui leva les yeux vers le toit. On aurait pu garer un vaisseau sontarien sous la haute voute vitrée. A travers le verre polymérisé, l'étoile jaune (pas très original comme nom, mais bon, quand on nomme plusieurs milliers d'étoiles chaque année, on se retrouve vite à cours d'inspiration) baignait l'amphithéâtre de sa douce lumière. Au milieu de la pièce, sur la large scène, il y avait une table imposante entourée par une douzaine de hauts sièges capitonnés de cuirs. Et dans ces sièges, les sages.
* Une belle bande de vieux renards, ces gars-là. Ils ont l'air séniles et stupides à première vue mais ils s'y connaissent pour tromper leur monde et ils ont l'esprit agile. Il est facile de les sous-estimer pour celui qui ne se méfie pas. Si en séance, ils vous demandent souvent de répéter parcequ'ils ont mal entendu, ils ont en fait l'ouïe fine et peuvent vous entendre murmurer à plusieurs mètres de distance. *
Toujours le sens du spectacle, ces ancêtres. Il était inutile de tenir cette réunion dans la grande salle, il y avait beaucoup d'autres salles de conférence dans la cité, certaines bien plus confortables et mieux chauffées qu'ici. Le choix du lieu n'avait rien d'anodin, c'était un message. Un message pour rappeler au jeune architecte qui dirigeait vraiment ici, et que les anciens avaient encore l'ascendant sur le jeune Dorian. Une attention que le nouvel architecte avait bien comprise, il était assez fin pour comprendre ces subtilités politiques. Le fait qu'on le convoque à neuf heure puis qu'on avance la réunion à 8h30, c'était un détail qui ne trompait pas. Heureusement, Dorian s'était avancé très en avance, soupçonnant ce genre de coup tordu, il ne voulait pas donner le plaisir aux vieux croulants de le voir arriver en retard à son premier jour de travail en tant qu'architecte. Et il était arrivé pile à l'heure, heureusement. L'horloge cosmique sonna la demi lorsque Dorian contourna la table pour s'asseoir à sa place. Se retrouver ainsi en bout de table, entouré par ces têtes de mort-vivants en aurait intimidé d'autres mais le jeune homme resta complètement impassible.
- Bonjour à tous.
Avec humeur, Dorian laissa tomber une lourde pile de dossiers sur la table. C'était les différents points qu'il voulait aborder lors de cette réunion, même s'il y avait là-dedans assez de travail pour l'occuper une vie entière. Il allait devoir fixer des priorités. Les sages ouvrirent des yeux ronds, ils ne s'attendaient certainement pas à ça. L'Architecte savoura ce bref moment d'effarement comme une petite victoire sur les anciens. Il y avait bien longtemps que l'on utilisait plus de papier dans les bâtiments de la Proclamation. Toutes les données transitaient par holodisque de nos jours mais Dorian était un réfractaire à cet usage. Il aimait le papier, le papier qu'on pouvait gribouiller quand on s'ennuyait, annoter quand on réfléchissait, ou déchirer quand on était énervé. Autant de libertés que ne permettaient pas les ordinateurs. Saletés d'ordinateurs, toujours à vous dire ce que vous deviez ou ne deviez pas faire. Au moins, un cahier de note ne vous renvoyait pas un message d'erreur si vous écriviez dans la marge.
Une fois la surprise passée, des sourires suffisants s'affichèrent sur les visages. Ils devaient probablement se dire que quelqu'un d'aussi archaïque ne pouvait pas être un grand réformateur, et que par conséquence, le petit nouveau serait facile à manoeuvrer. Dorian allait dissiper ce malentendu rapidement, mais pour l'instant, il savourait le mépris qu'ils affichaient à son égard. Au moins, si on le pensaient incapable, personne n'essaierait de lui mettre des bâtons dans les roues. Il allait profiter de cette période de flottement pour mettre ses réformes en route. Lorsque l'administration découvrirait qu'il n'était pas le mouton docile qu'ils souhaitaient, il serait trop tard pour faire marche arrière.
- Bien, nous nous connaissons déjà, inutile donc de perdre plus de temps en présentations et palabres superflues. Commençons par l'ordre du jour si vous voulez bien...
- Un instant, Architecte Dorian. Vous avez été élu par les cinq chambres représentatives, et pour cela, en mon nom et en celui de mes confrères ici présents, je vous félicite. Cependant, vous n'êtes pas encore investi officiellement de votre charge, et par conséquent, discuter de dossiers en cours semble un peu précipité...
La voix suave et mielleuse appartenait à Silviane Alleen. Les ennuis commençaient déjà. La famille Alleen était réputée pour ête l'une des plus conservatrice de la Convention. Des rumeurs étaient parvenues au jeune homme, lui indiquant que le clan Alleen et Silviane en particulier avaient utilisé toute leur influence au sein de la Convention pour faire invalider la candidature de Dorian au poste d'Architecte. Par bonheur, la manoeuvre avait échoué d'un cheveu. Le jeune homme était sûr d'une chose, elle ne comptait pas parmi ses alliés. Dorian se tourna lentement vers elle et marqua son agacement d'avoir été interrompu. Il fixa la grande femme dans les yeux et la foudroya du regard. Cependant, son ton resta parfaitement neutre et détaché lorsqu'il lui répondit.
- Ma chère amie. J'ai la charge d'Architecte à compter de ce jour, même si la petite cérémonie d'investiture n'aura lieu qu'à 14 heures cet après-midi. Et je ne vois absolument aucune raison pour ne pas assumer mes responsabilités avant cette heure. Mon temps est précieux alors si vous avez quelque-chose à dire au conseil, je vous recommande de le faire maintenant, de manière à ne plus m'interrompre quand je parle.
Une mèche grise se détacha du chignon de la vielle femme. Son visage était figé dans une expression d'ahurissement complet. Elle ouvrit et ferma plusieurs fois la bouche sans pouvoir émettre un son, comme un poisson hors de l'eau. Dorian dût se contenir pour ne pas éclater de rire à cette réaction. La vielle bourrique n'avait sûrement pas l'habitude qu'on lui parle sur ce registre, elle qui appartenait à l'un des groupes les plus influent et les plus respecté de la Convention. Ses compères remuèrent légérement sur leur sièges, mal à l'aise. Certains était tout aussi outrés qu'elle mais quelques sourires amusés se formèrent sur les lèvres de certains sages, bien contents que quelqu'un la remette enfin à sa place. La noble dame se rassit et murmura dans un souffle :
- Pardonnez-moi, vous pouvez poursuivre...
Et ce n'était que le début.
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